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ADB Actualités

Actualité juridique des entreprises par ADB à Ambérieu-En-Bugey, Oyonnax et Nantua

Marchand de biens : qui, quand, comment ?

En matière immobilière, il est une notion mal connue qui présente des dangers en matière de conséquences fiscales et sociales : c’est la requalification en qualité de marchand de biens.

Notons tout d’abord que ce terme fait référence à une activité commerciale. Or, l’immobilier est en principe une activité civile qui consiste à gérer un patrimoine : on achète un bien immobilier pour y habiter ou pour le louer. Et la location n’est pas considérée, dans le droit français, comme un acte de commerce. De même, la simple vente de son habitation principale est un acte civil de gestion de son propre patrimoine.

Mais les choses se compliquent dès lors que l’intention du propriétaire change. Si l’achat de l’habitation se fait avec une forte arrière pensée de plus-value ou si l’achat d’un immeuble est suivi de sa revente à la découpe, on comprend que l’investissement n’est plus simplement patrimonial. Il peut caractériser l’exercice d’une activité professionnelle. S’agissant d’achats réalisés spécialement en vue de leur revente, ces opérations peuvent constituer des actes de commerce, d’où la requalification de leur auteur en tant que « marchand de biens ».

A partir de quand devient-on marchand de biens ? Il n’existe aucune règle mathématique. On peut le devenir avec un seul bien immobilier : achat d’un immeuble suivi de la revente à brève échéance de plusieurs appartements. On peut également ne pas l’être en revendant plusieurs fois son habitation principale pour raison de mutation professionnelle. Les critères principaux restent la répétition de l’acte et l’intention.

S’agissant de la répétition de l’acte, un arrêt récent du Conseil d’État indique par exemple que le fait qu’une SCI n’ait procédé à aucune vente pendant une année ne suffit pas à considérer qu’elle n’a pas d’activité de marchand de biens.

Quant au caractère intentionnel ou non de l’acte, toute la difficulté est d’en apporter la preuve. A titre d’exemple, le particulier qui revend plusieurs fois son habitation principale pour en acheter une autre de la même surface dans le même quartier risque fort de faire l’objet d’une attention toute particulière de la part de l’administration fiscale. De même, sa profession (agent immobilier, maçon…) pourra influer sur le caractère commercial de l’opération au vu de sa connaissance du marché.

Quelles sont les conséquences d’une telle requalification ? La vente d’un bien immobilier par un particulier dans le cadre de la gestion normale de son patrimoine est taxable selon un taux forfaitaire décomposé en deux parties : un taux de 19 % au titre de l’impôt sur le revenu et un taux de 17,2 % au titre des prélèvements sociaux, soit un total de 36,2 % sur la plus-value réalisée. Ce taux est même nul pour la vente de l’habitation principale.

En revanche, une personne requalifiée de marchand de biens subit la fiscalité d’un commerçant. Comme pour un revenu d’activité, il est taxable au barème d’imposition de 0 %, 14 %, 30 %, 41 % ou 45 % selon le niveau de revenus du foyer fiscal. Et comme il s’agit alors d’une activité professionnelle, il convient d’appliquer les charges sociales des travailleurs indépendants (SSI, ex-RSI) dont les taux cumulés peuvent approcher 50 %… Le tout peut être copieusement arrosé de pénalités allant jusqu’à 40 % (voir 80 %) en matière d’impôt sur le revenu. Dans certains cas, la TVA peut même s’ajouter au prix de vente. Sur ce dernier point, le Conseil d’État considère qu’un particulier qui revend des parcelles de terrain suite à une forte viabilisation est assujetti à la TVA.

Comment éviter ces désagréments ? Le contribuable qui pense réaliser une opération commerciale sur un bien immobilier doit s’immatriculer et choisir la fiscalité la plus appropriée pour lui. Il peut s’agir de constituer une société soumise à l’impôt sur les sociétés. Dans d’autre cas il pourra être opportun de choisir l’impôt sur le revenu (ex : construction d’une maison en vue de sa revente par un contribuable qui n’exerce pas une activité immobilière).

CE 18 mars 2020 n° 425443

CE 9 mars 2020 n° 432596

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