Le bailleur commercial n’est plus roi

Au cours de la dernière décennie, la responsabilité du bailleur qui détient les murs d’un fonds de commerce a eu tendance à s’accroître. La Loi Pinel du 18 juin 2014 a sensiblement renforcé ses obligations vis à vis du locataire : l’indication de la répartition des charges, l’obligation d’un état des lieux, l’état prévisionnel des travaux… Parallèlement, on a pu constater régulièrement des mises en causes pour manquement à son obligation de délivrance prévu par le Code Civil : cette garantie apportée par le bailleur contre tous les vices ou défauts de la chose louée qui en empêchent l'usage. Ainsi, s’il était courant de faire supporter toutes formes de réparations au locataire à l’exception de la toiture, il en va tout autrement aujourd’hui.

Nouvelle illustration de cette évolution : un locataire obtient une indemnisation pour la dégradation de la commercialité des lieux. Voici les faits reprochés :

le propriétaire d’un centre commercial n’a pas « employé des efforts suffisants pour mettre fin au dysfonctionnement du chauffage [...] aux infiltrations constatées dans le plafond du local et le parking commun et au défaut de sécurité qui avait affecté le centre commercial pendant plus de dix ans », il a « manqué à ses obligations en ne procédant pas aux diligences nécessaires pour que le syndicat des copropriétaires remédie à l'insécurité et au mauvais entretien des lieux ». La Cour en conclue que « le dépérissement du centre commercial et sa désertification, en relation avec ces manquements, était à l'origine, au moins en partie, par un effet de chaîne, de la dégradation de la commercialité des lieux ».

Conséquence : le bailleur est condamné à verser 80.000 € de dommages-intérêts au locataire notamment au titre de la perte de clientèle occasionnée.

Cass. 3e civ. 23-1-2020 n° 18-19.051 F-D, Sté Ochito c/ Sté Univers des sacs